CHU DE LIEGE
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Infirmier de liaison
«
La chimiothérapie peut cependant être délivrée selon plu-
sieurs modalités
», précise le Pr. Brieuc Sautois. «
Elle est gé-
néralement associée à la radiothérapie, dans un traitement
de première intention ou après une chirurgie d’exérèse, si
la pièce de résection présente des caractéristiques péjora-
tives. On la délivre seule, en induction, dans la perspective
d’une préservation laryngée, ou à titre palliatif, pour retar-
der l’évolution fatale quand le cancer n’est plus curable.
»
Radiochimiothérapie de première ligne
La place de la chimiothérapie associée à la radiothérapie
est bien établie dans les cancers ORL avancés.
La radiothérapie est administrée à raison d’une fois par
jour pendant 5 à 6 semaines et la chimiothérapie compre-
nant un sel de platine (de préférence le cisplatine), une fois
par semaine, à une dose de 40mg/m
2
. «
C’est un traitement
de 7 à 8 heures, impliquant de longues périodes d’hydra-
tation par voie intraveineuse pour protéger la fonction
rénale
», souligne le Pr. Sautois. Outre l’accentuation de la
toxicité sur les muqueuses bucco-pharyngées, induite par la
radiothérapie, on compte en effet parmi les effets secon-
daires lourds du traitement une toxicité pour les reins, une
augmentation de la fragilité face aux infections et, dans
une moindre mesure, des nausées et des vomissements.
Chimiothérapie néo-adjuvante
Administrée de manière intensive, elle nécessite une hospi-
talisation d’au moins 5 jours. Elle combine le cisplatine, le
fluorouracile et le docetaxel (TPF) et concerne deux types de
patients : «
Lorsque l'on constate la présence d’une masse
tumorale importante, ou lorsque la croissance de celle-ci
est tellement rapide qu’il n'est pas souhaitable d’instaurer
d’abord la radiothérapie. On programmera alors 2 cures es-
pacées de 3 semaines, voire une 3
e
ou une 4
e
cure en fonction
de la réponse, avant d’embrayer avec un traitement local »,
explique le Pr. Sautois.
« Dans le deuxième cas de figure, on
souhaite privilégier la préservation laryngée. On commen-
cera par un traitement chimiothérapique selon les mêmes
modalités pour, si la réponse est correcte, remplacer ensuite
la chirurgie par la radiothérapie ou la radiochimiothérapie
. »
En induction, la chimiothérapie entraîne des effets secon-
daires extrêmement sévères : diminution profonde du
taux de globules blancs, nausées, vomissements, toxicité
rénale, alopécie complète et fatigue sévère.
Chimiothérapie palliative
«
Il existe un traitement de référence, lourd, qui n’a pas
nécessairement sa place dans tous les contextes palliatifs.
C’est une association de cisplatine, de fluorouracile et de
cetuximab qui nécessite en effet, assez paradoxalement, un
état général satisfaisant, en raison de ses effets secondaires
sévères
», précise le Pr. Sautois. «
Les autres traitements sont
davantage administrés
"
à la carte" : cisplatine éventuelle-
ment associé au fluorouracile, methotrexate, docetaxel ou
paclitaxel selon des modalités variables. Malheureusement,
ils sont généralement peu satisfaisants et offrent de faibles
chances de succès durable. On recommande parfois aux
patients de participer à une étude clinique pour tester de
nouveaux médicaments prometteurs.
»
La radiobiothérapie
Les anticorps (Ac) monoclonaux font, depuis quelques an-
nées, partie de l’arsenal thérapeutique en vigueur dans le
traitement des cancers ORL avancés. Le cetuximab, dirigé
contre le facteur de croissance épidermique, améliore l’effi-
cacité de la radiothérapie définitive des cancers localement
avancés. Il est remboursé, en Belgique, en cas de contre-
indication à la radiosensibilisation standard par cisplatine
(p. ex : faiblesse des fonctions rénales et médullaires). Il est
administré une fois par semaine, en hôpital de jour, dès
la semaine précédant la première séance de radiothérapie.
Il présente une toxicité propre, qui entraîne une éruption
cutanée de type acnéiforme et des réactions allergiques,
peu fréquentes, qui nécessitent la prise préalable d’un
antihistaminique et l'administration de l'anticorps dans un
environnement médical adéquat.
LIRE
+
•
Martin M., Demez P., Moreau P., Devillers D., Piret P., Sautois B.,
Chimiothérapie néoadjuvante dans les cancers
"
tête et cou
"
.
Rev Med Liège 2010 ; 65 :1 :15-17
•
Sautois B., Martin M., Demez P., Piret P., Devillers D., Moreau P.,
Place des anticorps monoclonaux dans le traitement des tumeurs
de la tête et du cou.
Rev Med Liège 2009 ; 64 : 5-6 : 284-286
Lorsque la chimiothérapie est réalisée
concomitamment à la radiothérapie, le taux de survie
à 5 ans s’améliore nettement, de l’ordre de 8% à 10%,
par rapport à celui obtenu avec une irradiation seule.
Plus de la moitié des patients traités pour un cancer de
la région oto-rhino-laryngologique présente, au moment
du diagnostic, un stade relativement avancé (III ou IV) qui
nécessite une prise en charge multidisciplinaire, associant
la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie,
ou des thérapies ciblées comme le cetuximab.
La chimiothérapie,
incontournable ?
Brieuc SAUTOIS