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MAGAZINE DE
L’ONCOLOGIE
Le service de diététique du CHU fait partie
intégrante de l’équipe pluridisciplinaire : il suit le
statut nutritionnel du patient tout au long de son
parcours.
Nourrir
:
une prise en charge essentielle
« Chez le patient oncologique, la dénutrition et le phéno-
mène de cachexie cancéreuse sont fréquents et peuvent cau-
ser la mort des patients jusque dans 20% des cas. Ces proces-
sus multifactoriels sont accompagnés d’une perte irréversible
de la masse musculaire, qui a un impact négatif direct sur la
déglutition »
, constatent Catherine Lefebvre, diététicienne,
et Anne-Marie Verbrugge, diététicienne en chef.
« Dans le cas
des cancers ORL, la difficulté supplémentaire est de faire passer
les aliments dans la bouche et le tube digestif. L’altération du
statut nutritionnel qui en découle entraîne une diminution de
la qualité de vie du patient, une diminution de l’efficacité des
traitements et une augmentation de leur toxicité ainsi qu’une
augmentation des dépenses de santé, ce qui fait de la dénutri-
tion un facteur indépendant de morbidité et de mortalité. »
Catherine LEFEBVRE
et Anne-Marie VERBRUGGE
Auteur d’une thèse sur la qualité de vie, le Pr. Pierre Demez
s’interdit toujours de répondre à la question que posent inévi-
tablement tous les patients :
« Que feriez-vous à ma place ? »
.
«
Parce que nous ne sommes pas à leur place. Parce qu’en tant
que médecin, on voudrait préserver la qualité de vie, alors
que ce que veulent les patients, c’est guérir, quel qu’en soit le
prix. Mais aussi parce que, quand on touche à la sphère ORL,
on touche à l’alimentation, à la parole, à la respiration. Para-
doxalement, l’alimentation est plus importante que la pa-
role, socialement parlant, dans nos contrées franco-latines :
se mettre à table, c’est plus que prendre un repas, c’est par-
tager quelque chose. Quand vous êtes nourri par sonde, que
vous n’avalez plus de nourriture solide ou que vous bavez,
cela a une incidence de poids sur votre vie sociale. Pour toutes
ces raisons-là, pour des raisons d’image et aussi d’estime de
soi, il peut arriver que l’on renonce à la chirurgie, par exemple
une laryngectomie totale, et que le patient soit orienté vers
un protocole de préservation d’organe sous forme d’une
radio-chimiothérapie. Lors de l’annonce du diagnostic et des
possibilités thérapeutiques, outre les chances de guérison, les
implications en termes de qualité de vie sont largement dis-
cutées et rentrent en ligne de compte dans la prise de déci-
sion finale, en fonction des impératifs de chaque patient. Par
ailleurs, quelle que soit cette décison, un support important
sera proposé au malade de manière à lui assurer la qualité
de vie la plus acceptable possible. Notre équipe comprend,
en effet, dans cette perceptive, une psychologue, des diété-
ticens, des kinésithérapeutes et des logopèdes, dont le rôle
est primordial.
»
LIRE
+
•
P.Demez, P.Moreau,
Perception of head and neck cancer
quality of life within the medical world: a multicultural study.
Head and Neck. 2009 Aug ;31(8) :1056-67
« Le but du médecin est de sauver le patient. En matière d’oncologie, et singulièrement d’oncologie ORL, on doit
garder à l’esprit que, plus que survivre, il doit vivre: s’il ne peut plus manger, parler ou respirer seul, le but est-il atteint?»
La qualité de vie du patient,
un facteur clé
Qualité de vie