MÊME APRÈS UN CANCER
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MARCEL (60 ANS)
APRÈS L’IMPLANT PÉNIEN:
«CELA FONCTIONNE
MIEUX QU’AVANT!»
TÉMOIGNAGE DE MARCEL ET DE BRIGITTE:
LE CANCER «SOUS LA CEINTURE» NE SIGNIFIE PAS
LA FIN DE TOUTE VIE SEXUELLE
Marcel (prénom d’emprunt) a 60 ans. Il
est ce qu’on appelle un cancéreux «sous la
ceinture»: diagnostiqué d’un cancer de la
prostate, il a subi une prostatectomie, une
ablation totale de la prostate. Dans sonmi-
lieu professionnel machiste, auparavant, il
blaguaitrégulièrementàproposdelasexua-
lité qui avait beaucoup d’importance dans
son couple. Socialement et depuis la pros-
tatectomie, cela lui pèse énormément et il
se renferme sur le couple qu’il forme avec
Brigitte (prénomd’emprunt). Le couple vit
assezmal cettemise enquarantaine. D’au-
tant que, si Marcel est guéri de son cancer,
sexuellement, les rapports ne sont plus ce
qu’ils étaient. Et loin de là… Et le couple
tangue.
«Le cancer de la prostate, pour la
plupartdesgens,estassimiléàlafindetoute
viesexuelle.C’estpourtanttotalementfaux»
affirme le Pr. Robert Andrianne.
Marcel le consulte. De suite, le clinicien
du CHU associe Brigitte aux rencontres.
Marcel explique son vécu au quotidien:
la disparition complète des érections et
des éjaculations. Certes, il y a toujours
orgasme mais il s’accompagne d’incon-
tinence. C’est l’orgasmurie. Il perd aussi
de l’urine en cas d’effort physique … On
comprend les difficultés du couple. Il est
pris en charge par une infirmière psycho-
logue et sexologue formée à Lyon par le Pr
Bondilàl’onco-sexologie,lapriseencharge
de la problématique sexuelle des malades
cancéreux. Cette nouvelle disciple - pour
laquelle le CHU de Liège a reçu une aide
de 30.000 € de la Fondation Contre le
Cancer - ne concerne pas seulement les
cancers urologiques: les discussions sur la
vie sexuelle doivent pouvoir se tenir pour
tous les cancers, masculins et féminins.
«On a commencé avec l’urologie parce que
le cancer de la prostate est, chez l’homme,
le 1er cancer détecté et le 3e «tueur». Il y
a en Belgique chaque année 3.000 traite-
ments en radiothérapie et 3500 opérations
pourlecancerdelaprostate.Maislesautres
disciplines médico-chirurgicales vont nous
rejoindre»
.
Au CHU de Liège, l’onco-sexologie se
structure, par la formation du personnel
à poser les bonnes questions, par l’infor-
mationdupersonnelquirencontrecetype
de pathologies et par la mise en place de
tout un réseau d’aide. En urologie, c’est le
travail de Mme Christine Debois. On est
loindudépliantexplicatifglisséentredeux
prescriptions…
Robert Andrianne l’assure: toute vie
sexuelle n’est pas terminée.
«Cela com-
mence par simplement en parler. C’est ce
quis’estfaitavecMarceletBrigitte,dèsl’an-
noncedudiagnosticetàtouteslesconsulta-
tions»
. La prise en charge psycho-sexolo-
gique du couple est nécessaire:
«l’annonce
du cancer et de ses conséquences sexuelles,
c’est un tsunami»
. Il faut quelques mois
pourstabiliserlepatientetluiproposerdes
solutionsmédicamenteusespuiséventuel-
lementmécaniques.
«Je prenais duViagra
maiscelaneservaitàrien
,expliqueMarcel.
L’on m’a dit aussi que la nature allait re-
connecter les nerfs titillés par l’opération.
Après huit mois, rien n’était reconnecté du
tout. On a essayé les piqures dans la verge.
Sans effet»
.
Le Pr Andrianne propose alors au couple
l’implant pénien, une pratique propor-
tionnellement cinq fois plus courante aux
Etats-Unis qu’en Belgique. En Belgique, il
s’en réalise 150 par an et le Pr. Andrianne
en réalise 80 avec son équipe.
«J’ai fait la
première en 1981. L’an prochain, j’en aurai
fait 1.000».
Pour aider à la continence, il
associe à l’implant pénien la pose d’une
petite «bandelette» sous l’urètre, qu’il ap-
pelle poétiquement la «mini-jupette» et
règle ainsi tout problème d’incontinence
etd’orgasmurie.Uneinnovationliégeoise.
Marcel a été opéré. L’implant a été installé.
C’estunactechirurgicald’uneheure.Mar-
cel est resté deux jours à l’hôpital.
«L’opé-
ration a changé ma vie. Ma vie sexuelle. Je
suis un autre homme. Six semaines après
l’opération, nous avons eu nos premiers
rapports. Cela fonctionne même mieux
qu’avant.Maismaviesocialeaussi.Toutest
à nouveau comme avant»
. Dans son coin,
Brigitte acquiesce: il y a une vie sexuelle
après un cancer de la prostate!
R.T.
QUEL ACCOMPAGNEMENT
PSYCHO-SEXOLOGIQUE?
En cas de dysfonction érectile résistante aux traitements médicaux, l’implant pé-
nien est une solution. Dans le service d’urologie du CHU de Liège (au CETISM:
Centre d’étude et de traitement interdisciplinaire de sexopathologie masculine,
une prise en charge globale est proposée à l’homme et sa compagne avec une des
consultations psycho-sexologiques préalables à l’implantation. «
Cette consultation
permet de dépister les fausses croyances de l’homme et de sa partenaire, de repérer
des éléments de psychopathologies chez l’homme, d’explorer les aspects relationnels,
affectifs, cognitifs et érotiques susceptibles d’influencer l’issue psychologique de l’im-
plant,
explique Christine Debois, la psycho-sexologue du CETISM.
Elle permet de
compléter l’information relative à la prothèse et de repérer les ressources du couple
à réhabiliter une intimité vivante après l’intervention. Cette entrevue antérieure à
l’intervention permet d’optimiser la satisfaction post-opératoire
».
Implant pénien 3 éléments Titan
de Coloplast/Porges. La prothèse
coûte 5000 €, remboursée à
80 %. L’opération est prise en
charge par la Mutuelle.
P.G.
Le désir apparaît dans la tête