CHU DE LIEGE
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La kératose actinique est une lésion dys-
plasique, c’est-à-dire précancéreuse. Elle ne
donne donc pas de métastases. En revanche,
non traitée, elle constitue un terrain favorable
au développement d’un carcinome spinocel-
lulaire. En raison de sa forte propension à la
récidive, cette pathologie impose par ailleurs
un suivi extrêmement régulier.
Les facteurs de risque
Tout comme le carcinome basocellulaire, la kératose acti-
nique est causée principalement par l’exposition chronique
aux rayons ultra-violets. Elle touche donc principalement
les personnes âgées de phototype clair. «
Mais si, aupara-
vant, il était relativement rare de voir des kératoses acti-
niques chez des patients de moins de 60 ans, il nous arrive
maintenant de recevoir en consultation des personnes
d’une quarantaine d’années, non immunodéprimées, pré-
sentant ce type de lésions, tant les habitudes d’exposition
solaire se sont modifiées
», nuance le Pr Dezfoulian.
Localisation de la tumeur
La kératose actinique touche le plus souvent les régions du
corps régulièrement exposées : le visage, principalement,
mais aussi les avant-bras, le décolleté et les jambes, chez
les femmes, le crâne, chez les hommes.
Description clinique de la kératose actinique
Le diagnostic de la kératose actinique est presque toujours
purement clinique, tant la lésion est typique : il se forme
une croûte grisâtre ou jaunâtre, dure à la palpation, par-
ticulièrement difficile à décrocher et qui, lorsqu’on l’ar-
rache, revient continuellement. On peut habituellement
la distinguer du carcinome spinocellulaire par sa superfi-
cialité et son caractère peu proéminent ; elle ne présente
pas d’ulcération, ni ce fond infiltré propre aux carcinomes
spinocellulaires. Une kératose actinique ne croît pas non
plus aussi rapidement que les lésions cancéreuses.
Le développement de la maladie
Si la kératose actinique évolue parfois en carcinome spi-
nocellulaire, c’est parce qu’elle touche les mêmes cellules
que celui-ci, à savoir les cellules spineuses de l’épiderme.
«
Le problème de la kératose actinique c’est que, même
une fois traitée – par exemple, à l’azote liquide –, elle
peut récidiver. Elle se développe en effet sur un terrain
de cancérisation en champs, c'est-à-dire sur une zone cou-
verte de lésions infracliniques susceptibles d'évoluer à des
moments différents
», souligne le Pr Dezfoulian. «
Il faut
donc revoir régulièrement les patients traités.
»
Le risque estimé d’une transformation d’une kératose ac-
tinique en carcinome spinocellulaire va de 0,01 à 1%. Les
patients immunodéprimés sont particulièrement à risque.
Quand cette transformation a lieu, il s’agit souvent de
carcinomes spinocellulaires bien différenciés, à faible po-
tentiel métastatique.
Kératose actinique sur la joue
Cancérisation en champ
La kératose
actinique
Les tumeurs non mélanocytaires
Description clinique
Attention aux perruques "cache-misère" !
«
Quand les patients consultent tardivement avec des kéra-
toses ou des carcinomes de stade avancé, ce n’est pas forcément
parce qu’ils pratiquent la politique de l’autruche. Il arrive qu’ils
ne soient tout simplement pas conscients de l’apparition ou de
l’évolution de la maladie. Les personnes âgées vivant seules et
médicalement peu suivies qui développent une lésion à l’arrière
du crâne, par exemple, peuvent ignorer son existence pendant
un temps considérable, en l’absence de douleur significative.
Le problème se pose avec une acuité particulière pour les dames
âgées qui dissimulent leur chevelure clairsemée sous une per-
ruque. Certaines d’entre elles n’ôtent cette perruque que rare-
ment et il est parfois bien tard lorsqu’un soignant ou un proche
découvre l’ampleur des dégâts ! C’est bien sûr un phénomène
relativement marginal, mais auquel les généralistes doivent être
attentifs ainsi que le personnel des maisons de repos. En effet, à
des stades très avancés, même une kératose actinique peut exi-
ger une exérèse chirurgicale assez délabrante.
»