Le rôle de la dermatopathologie
dans le diagnostic
et le choix
des traitements des tumeurs cutanées
L’anatomopathologie étudie les lésions macroscopiques et
microscopiques des tissus prélevés (par excision chirurgicale,
biopsie, frottis, etc.). Appliquée aux tissus cutanés, la spécia-
lité est nommée plus précisément "dermatopathologie".
«
On peut dire du diagnostic d’une tumeur qu’il est ‘’ana-
tomoclinique’’ »,
précise le Professeur Jorge Arrese Estrada.
« L’anatomopathologiste confirme ou infirme le diagnostic
proposé par le clinicien. C’est ce dernier qui examine le pa-
tient et prélève le matériau sur lequel va travailler l’anato-
mopathologiste. Ce matériau lui parvient accompagné d’une
description clinique complète et, le plus souvent, d’une ques-
tion visant un ou plusieurs diagnostics possibles.
»
Les cinq questions successives
que doit se poser le dermatopathologiste
1
Tumeur ou pas tumeur ?
2
Bénigne ou maligne ?
3
La tumeur est-elle primitive ou secondaire ?
4
Quelles sont les particularités
des cellules tumorales observées ?
5
A-t-on bien réséqué toute la tumeur
ou seulement une partie ?
«
Initialement, le rôle de l’anatomopathologie se concentrait
sur les deux premières questions ; mais, avec le temps, son
apport a largement dépassé la dimension purement diagnos-
tique : elle vise aujourd’hui à évaluer les facteurs d’évolution
d’une tumeur identifiée comme maligne afin d’affiner au
maximum le pronostic et de déterminer un traitement plus
ciblé. Parmi ces facteurs d’évolution, on peut citer le pléomor-
phisme des noyaux des cellules et l’importance de leur activité
mitotique. Il s’agit de déterminer les capacités d’extension et
d’infiltration de la tumeur, mais aussi son éventuelle propen-
sion à métastaser.
»
Pour comprendre l’évolution probable de la tumeur diagnos-
tiquée, le dermatopathologiste doit s’intéresser aussi à sa ge-
nèse et à ses causes profondes. Cette approche vise à prévenir
une éventuelle récidive, mais participe aussi à la définition du
traitement le plus adapté.
La question de la résection totale de la tumeur est évidem-
ment tout aussi essentielle, comme le rappelle le Pr Arrese
Estrada : «
Le dermatopathologiste doit disposer de coupes
(centrales et latérales) représentatives de la totalité de la
pièce de résection et en examiner très attentivement les
contours afin de déterminer si la tumeur a été enlevée tota-
lement et avec une marge suffisante.
»
L’immunohistochimie et la biologie moléculaire
La préparation standard des coupes histologiques consiste à
les colorer avec de l’hématoxyline-éosine. En complément de
l’observation réalisée sur cette première lame standard, on
peut, en fonction du diagnostic présumé, préparer d’autres
lames pour un examen par immunohistochimie à l’aide d’an-
ticorps spécifiquement dirigés contre certains constituants
des cellules tumorales. «
En se liant à certains antigènes spé-
cifiques des cellules néoplasiques, les anticorps vont former
un complexe que nous allons pouvoir visualiser sur la lame
et qui vont nous aider à préciser le diagnostic définitif de la
tumeur
», précise le Pr Arrese Estrada.
La biologie moléculaire, quant à elle, va permettre, pour cer-
taines tumeurs, de déceler des modifications génomiques qui
leurs sont plus ou moins spécifiques.
La recherche des micrométastases satellites
Il arrive que des cellules néoplasiques soient détachées de la
masse principale de la tumeur, tout en demeurant à proxi-
mité de celle-ci. La présence de ces micrométastases satellites
traduit un fort risque de dissémination de la tumeur et rend
absolument nécessaire la vérification de la présence de cellules
tumorales au niveau des ganglions sentinelles.
Deux grandes catégories de tumeurs malignes :
mélanocytaires ou non mélanocytaires
La première catégorie de tumeur concerne les mélanocytes de
la couche basale de l’épiderme qui synthétisent la mélanine et
régulent la pigmentation de la peau. Le représentant principal
des tumeurs mélanocytaires malignes est le mélanome, res-
ponsable de plusieurs centaines de décès par an en Belgique.
Les tumeurs non mélanocytaires peuvent provenir de toutes
les autres cellules composant la peau : épithéliales, vasculaires,
endocrines, lymphoïdes, cartilagineuses ou musculaires. L’ap-
partenance de la tumeur considérée à l’une ou à l’autre de ces
deux catégories va conduire à des analyses histologiques bien
différenciées, notamment sur le plan immunohistochimique.
Pr
Jorge ARRESE ESTRADA
Anatomopathologie
Un badigeon à l’encre de Chine
Lorsqu’on excise une masse tumorale, la première chose que l’on fait, avant d’y débiter les différentes coupes histologiques,
c’est de la badigeonner à l’encre de Chine. De la sorte, sur chaque lame, le dermopathologiste repérera aisément la ligne noire
correspondant au pourtour de la masse excisée et vérifiera que ce trait ne montre aucun signe d’infiltration de la tumeur.
Tumeur maligne anaplasique
non-mélanocytaire (carcimone
spinocellulaire non différencié)
Tumeur maligne mélanocytaire
(mélanome)
CHU DE LIEGE
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