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Le rédacteur invité

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MAGAZINE DE

L’ONCOLOGIE

Entretien avec Arjen Nikkels :

La dermato - oncologie dans la peau !

Commençons par le commencement, pourquoi avoir

choisi la dermatologie comme spécialité ?

Arjen Nikkels :

Parce que la peau est un organe fascinant.

J’aime le comparer à une "fenêtre" donnant sur le fonction-

nement de notre organisme. C’est un organe de communica-

tionqui peut livrerdeprécieuses informationsquant àd’éven-

tuels dysfonctionnements internes. Par son extraordinaire

accessibilité, la peau offre en outre aux dermato-oncologues

la très grande chance de pouvoir détecter tôt d’éventuelles

anomalies, parfois avant même le début de la carcinogénèse.

Le Service de dermatologie du CHU de Liège est

en croissance constante. Pouvez-vous nous citer

quelques chiffres qui en donnent la mesure ?

A. N. :

En 2008, le service comptabilisait sur une année envi-

ron 20.000 contacts-patients (englobant les consultations et

les actes techniques). En 2015, nous allons en enregistrer

près de 45.000, soit plus du double. Si l’on se focalise sur

l’activité liée aux tumeurs cutanées, voici encore quelques

chiffres qui reflètent notre volume d’activité sur une année :

entre

100 et 120 nouveaux cas de mélanomes

;

plus de

600 nouveaux cas de carcinomes

basocellulaires

(dont on parvient à traiter environ

25% sans excision chirurgicale) ;

environ

150 patients suivis pour un carcinome

spinocellulaire

(éventuellement chronique) ;

environ

50 patients suivis pour un lymphome

cutané primitif

.

La recherche en onco-dermatologie a accompli des

progrès spectaculaires ces cinq dernières années,

notamment en ce qui concerne le traitement des

mélanomes métastatiques. Comment le CHU de Liège

se situe-t-il par rapport à ces développements ?

A. N. :

Au CHU, nous avons le privilège, en tant que centre

universitaire, de participer à un grand nombre d’études

cliniques portant sur les nouvelles molécules mises au jour

ce biais, à des traitements généralement indisponibles.

En qui concerne l’activité de recherche propre au Service

de dermatologie du CHU, on peut citer sa participation à

une étude multicentrique initiée par la KUL et visant à dé-

terminer si des doses importantes de vitamine D peuvent

être bénéfiques aux patients atteints d’un mélanome. Le

Docteur Florence Libon finalise actuellement une thèse

de doctorat dont l’objet est la synthèse de la vitamine

D, l’exposition aux UVB et le rôle de la photoprotection.

Les recherches qu’elle mène en font un interlocuteur très

précieux pour nos patients, auxquels elle peut donner des

informations et des conseils à la fois précis et concrets.

Pour vous, quel est l’enjeu majeur des prochaines

années dans la prise en charge des cancers de la peau ?

A. N. :

Sans hésiter : la prévention ! Depuis trente ans, l’inci-

dence du mélanome ne cesse d’augmenter et les carcinomes

touchent des patients de plus en plus jeunes. Quand j’étais

assistant, un cas de cancer à l’âge de 50 ans était considéré

comme exceptionnel ; aujourd’hui, il n’est même plus si rare

d’en diagnostiquer sur des patients d’une trentaine d’an-

nées. Bien sûr, lutter contre les cancers de la peau c’est an-

crer le réflexe du dépistage annuel et soutenir la recherche

en matière de traitement des mélanomes métastatiques,

mais l’enjeu majeur réside dans le changement radical de

mentalité qui doit s’opérer sur le plan collectif. Il faut en

finir avec la mode du bronzage et le marketing pernicieux

qui en découle ! Pourquoi mettre en scène des jeunes gens

bronzés pour promouvoir le sport ou une alimentation

saine ? C’est ce message subliminal qui incite le public à

tracer un signe d’égalité entre une bonne santé et un teint

hâlé qui me révolte. Il est temps qu’à cet égard, les mé-

dias et les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités !

Arjen Nikkels est né aux Pays-Bas. Il fait ses

études de médecine et sa spécialité en dermato-

logie à L’Université de Liège entre 1983 et 1994.

Il présente sa thèse de doctorat en 1997, sa

thèse d'agrégation en 2006, et se voit confier la

direction du Service de dermatologie du CHU de

Liège en 2008. C’est au traitement des lésions

cutanées cancéreuses qu’il consacre aujourd’hui

la majeure partie de son activité clinique. Il fait

partie des fondateurs de la

Belgian Association

of Dermato-Oncology

(BADO), créée en 2012.

« ... La peau est un organe fascinant. J’aime le

comparer à une " fenêtre" donnant

sur le fonctionnement de notre organisme... »

« ... Un changement radical de mentalité doit s’opérer

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bronzage et le marketing pernicieux qui en découle ! »

Pr

Arjen NIKKELS